Crue
Quel bordel, en ce moment ! C'est pire qu'au PS, dans ma tête. Tout se mélange : la musique, l'écriture, les amis, les proches, les filles, la politique, tout. Je n'arrive plus à tout ranger dans les cases. Je n'arrive plus à trouver de la place pour tout mettre. Mon cerveau déborde de partout, ça dégouline le long de mon crâne et je n'y comprends plus rien. Mes cigarettes se consument encore plus rapidement, mes verres se vident toujours autant, dans une incapacité à distinguer le propre du moche, le beau du sale.
Comment ça commence ? Comment ça vient à nous ces périodes de doute et d'incompréhension totale, d'absence d'inspiration ? Peut-être par un émerveillement, une envie, un désir ? Et puis le temps passe. Et on se lasse, on se fatigue, on s'encroute. Alors on veut tout, tout de suite ou alors rien. Nous ne sommes plus que des âmes nombrilistes qui exigent le meilleur et crachent sur le médiocre. Alors comment vivre ? Comment s'organiser ? Comment survivre ? Comment s'aimer ? Comment se regarder dans la glace ? Comment faire rire, pleurer, émouvoir ? Comment s'énerver ou se rassurer, aimer ou détester ? Comment être un Homme ? Comment fuir toutes ces choses qui ne sont pas humaines mais qui donnent à l'Homme sa grandeur et son humanité. Je n'aime pas les Hommes ; j'aime l'Homme dans tout ce qu'il a de grand, de beau, de pur. Misanthropie aiguë, comme toujours, sociabilité beaucoup trop riche. Comment mélanger le rouge et le noir, le sang et l'horreur, la tranquillité et le sale ?
Que dire de ces tableaux que l'on noircit de blanc ? Que dire de ces tables qui nous servent de pistes de danse ? Que dire de ces débats qui ne mènent à rien ? Que dire de ces actions politiques incessantes qui ne nous empêcheront pas de tomber dans le chaos ? Que dire de ce pseudo-courage qui nous permet encore de nous regarder dans la glace et de nous sentir encore un tant soit peu exister ? Que dire de ces mots qui nous tuent sans que l'on s'en rende compte ? Que dire de cette impression de ne plus exister, d'être de trop parfois ? Que dire de cette liberté que l'on croit obtenir comme une Révolution Permanente et qui nous opprime encore plus parce qu'on la cherche encore et toujours, puisqu'elle est infinie ? Que dire de cette envie de partir, loin, très loin, pour vider tout cela et pour ranger correctement la chambre noire et vivre encore des trucs trop bien ?